La décision très intéressante de Vancouver Community College était récemment infirmée en appel devant la Cour d’appel de Colombie-Britannique (Vancouver Community College v. Vancouver Career College (Burnaby) Inc., 2017 BCCA 41). On infirme ainsi la décision de 2015 dans cette affaire, qui avait statué que l’utilisation par un concurrent (du détenteur d’une marque de commerce) d’un nom de domaine et de mots-clés (Google AdWords) n’était pas problématique.
Comme on s’en souviendra, le demandeur dans cette affaire avait adopté la marque VCCollege, qu’un concurrent direct avait ensuite repris dans son nom de domaine vccollege.ca et certains mots-clés achetés chez Google à des fins publicitaires.
Cette décision d’appel vient confirmer que l’utilisation d’un nom de domaine et de mots-clés peut s’avérer génératrice de responsabilité quand une entreprise reprend ainsi la marque de commerce d’un concurrent, et ce, peu importe le contenu de son site Web. Contrairement à la décision de première instance, la cour d’appel vient en effet ici préciser qu’on peut parler de confusion AVANT même qu’un internaute ne clique sur un lien afin de voir le contenu qui se cache derrière. La confusion d’un internaute constitue donc (juridiquement) de la confusion, et ce, même si cette confusion peut être écartée ensuite en cliquant sur un lien et en lisant et visionnant ce qui se trouve sur la page suivante. La possibilité d’éliminer la confusion en créant un site Web sans lien avec le détenteur de la marque visée n’est donc PAS une défense en droit.
En droit, rien ne permettant de distinguer le nom de domaine http://www.vccollege.ca de la marque VCCollege, la confusion s’avère probable dès qu’un internaute se trouve devant ce nom de domaine, même ne serait-ce que parmi des résultats de recherche sur le moteur de recherche Google. L’affichage même du nom de domaine équivaut donc à un geste qui touche l’achalandage de la marque de comerce visée.
Cela semble confirmer que le concept américain de «initial interest confusion» semble bien en voie d’être importé au Canada.
Ce faisant, les entreprises canadiennes disposent dorénavant d’un bel argument à formuler à l’encontre des tiers qui enregistrent sans droit des noms de domaine reprenant leurs marques de commerce, particulièrement lorsqu’il s’agit de concurrents.
Ici, la combinaison des mots-clés achetés de Google et du nom de domaine présenté dans les résultats générés par ces mots-clés sont ce qui a créé, en particulier, un résultat problématique. Par contre, il est important de noter que cette décision ne dit PAS que le simple achat de mots-clés s’avère, lui, un problème.
More significantly, the critical factor in the confusion component is the message communicated by the defendant. Merely bidding on words, by itself, is not delivery of a message. What is key is how the defendant has presented itself, and in this the fact of bidding on a keyword is not sufficient to amount to a component of passing off, in my view.
Conclusion (et c’est majeur): OUI, en droit canadien, le choix et l’utilisation d’un nom de domaine peuvent causer la contrefaçon de la marque de commerce d’une autre entreprise, peu importe le contenu du site Web hébergé derrière ce nom de domaine. Résultat: un tel comportement ouvre la porte à une poursuite par l’entreprise lésée, en contrefaçon de sa marque, que ce soit par injonction ou autrement.