Comme vous le savez peut-être, le concept d’un réseau de téléphonie cellulaire implique nécessairement que votre appareil se connecte à des tours de transmission, au fil de vos déplacements. À chaque fois, le système enregistre l’identité de l’abonné (par son appareil) et où il se trouve. Ainsi, bien que plusieurs l’ignorent, au besoin, les fournisseurs (qui contrôlent ces tours) peuvent interroger leur système, afin de connaître l’historique de connexion de tel ou tel appareil. On peut ainsi en principe obtenir une carte des déplacements de l’appareil d’un abonné dans le temps.
Cet état de fait se retrouve récemment dans les médias, suite à une affaire actuellement devant les tribunaux, d’où ce billet. Les médias rapportent que la Cour suprême américaine étudie en effet présentement la question du droit de l’état d’utiliser (en preuve) les données de localisation des appareils cellulaires issues des tours, même sans mandat.
Le cas d’un accusé nommé Timothy Carpenter soulève ainsi la question de savoir si les forces de l’ordre peuvent utiliser l’information colligée par les tours de télécommunication (quant à la localisation des téléphones cellulaires qui se branchent au réseau), et ce, SANS mandat de perquisition. En l’occurrence, devrait-on permettre aux policiers et à la poursuite d’utiliser une telle preuve, par exemple afin de prouver, en cour, l’endroit où se trouvait le téléphone d’un individu donné, à tel moment?
On le comprend, cette question implique un type de données à la frontière de ce qu’on peut considérer soit comme des données personnelles ou, alternativement, comme de simples données d’utilisation de l’infrastructure de télécommunication. Ces données sont-elles de nature privée ou non? La question de pose… surtout que ce moyen de preuve ne dépend pas de l’activation de la balise GPS d’un appareil. En effet, dès qu’un téléphone cellulaire est connecté, cela laisse une trace dans le système; cette trace devrait-elle être susceptible d’utilisation par les policiers sans qu’un juge doive l’autoriser?
Compte tenu de la proportion importante de Canadiens désormais munis d’un appareil de téléphone cellulaire (qui les accompagne généralement partout), la question s’avère d’intérêt même chez nous. Nos tribunaux devront assurément se prononcer éventuellement sur une question similaire; à ma connaissance, la question ne s’est pas encore posée ici.
En attendant, l’affaire Carpenter a tout de même de quoi en faire réfléchir plus d’un sur les répercussions que peut avoir le fait de trimbaler (volontairement) l’équivalent d’une balise électronique sur soi, en quasi-permanence.