Faisant suite à des propos comme ceux que je tenais il y a quelques semaines à ce sujet, on rapporte que le dernier budget québécois prévoit 500 millions de dollars pour permettre au ministère de la Justice de mettre le système judiciaire à jour. Oui, un demi-milliard de dollars pour sortir notre système de justice sclérosé, victime de façons de faire archaïques généralisées et d’un marasme technologique insurmontable depuis trente ans.
En fait, comme chaque juriste peut en témoigner, c’est tout le système judiciaire qui doit être modernisé, notamment en uniformisant les façons de faire et les méthodes, en plus de prendre un sérieux virage technologique.
Plus de la moitié de la somme serait d’ailleurs destinée à la modernisation du matériel et des systèmes informatiques comme tels. Quand on regarde les ordinateurs visibles dans les palais de justice, il ne fait pas de doute qu’on n’aura pas de trop de 289 millions de dollars pour amener notre système judiciaire jusqu’au XIXe siècle. Je présume que cette mise à jour comprendra la formation du personnel des palais, dont certains préposés semblent encore habitués à utiliser des machines à écrire ou du matériel informatique de la génération des AS/400. J’exagère? OK, oui, un peu… un peu, peut-être.
Le ministère de la Justice aurait d’ailleurs en tête de munir la population d’un guichet virtuel unique en matière de justice et d’information aux citoyens. Révolution annoncée, on parlerait aussi d’un greffe numérique, grâce auquel on pourrait déposer et consulter en ligne les actes de procédures et les pièces aux dossiers. Les rôles d’audience seraient aussi numérisés et des fonctionnalités de prise de rendez-vous en ligne seraient incluses. Ciel! Que d’efficacité annoncée, ajouterais-je avec une pointe d’ironie.
Il semble que les aspirations du ministère de la Justice iraient aussi (et on verra où cela mène et à quelle vitesse, remarquez bien!) jusqu’à permettre la tenue d’audiences à l’aide du numérique et des télécommunications.
Bien que cela semble élémentaire, les juristes savent que ce genre de fonctionnalité numérique fait actuellement complètement défaut dans notre système judiciaire. Comme le mentionne l’article de La Presse cité ci-dessus, dans les palais de justice, à l’heure actuelle, on est encore souvent encore à l’ère de la machine à écrire et du papier carbone.
En fait, le genre de choses qu’envisage ici notre ministère de la Justice sont courantes dans de nombreux autres systèmes et juridictions. Disons que je vois ici peu de raisons de se vanter, et que le sentiment de honte généralisé quant à l’état de notre système de justice devrait plutôt, selon moi, nous inciter collectivement à mettre les bouchées doubles pour régler ce désastre, sans tenter au passage de prétendre qu’il y a là quoi que ce soit d’extraordinaire. Les cyniques annoncent d’ailleurs déjà des problèmes avec tous ces nouveaux systèmes à créer qui, comme cela a TRÈS fréquemment été le cas (au Québec et au Canada), sont souvent de beaux rêves qui tournent au cauchemar quand on tente d’en faire une réalité sur le terrain, notamment à cause de dépassements d’échéanciers et de coûts, etc.
À tout événement, en attendant, tant qu’il y a de l’argent, il y a de l’espoir, je suppose.