La Cour d’appel du Québec se prononçait à la fin décembre sur la Loi visant à interdire et à prévenir la discrimination génétique (la «LNDG»), une loi adoptée par le Parlement fédéral en 2017 visant justement à empêcher les entreprises de se mettre à exiger des tests génétiques de clients, d’employés, etc. Selon la Cour d’appel, le cœur de cette loi s’avère invalide parce que dépassant ce que permet la Constitution canadienne. En somme, cette loi s’avère défectueuse, affectée d’une tare génétique, si vous préférez, de conclure notre Cour d’appel.
La décision de la Cour d’appel du 21 décembre 2018 déclare en effet que les articles 1 à 7 de cette loi dépassent ce que permet l’article 91 de notre Constitution pour le législateur fédéral. En réalité, selon la Cour d’appel, le caractère véritable des articles visés de la LNDG est de prohiber l’usage des tests (ou résultats de tests) génétiques, y compris lorsque des individus se procurent des biens ou des services. Selon le tribunal, le but ici toucherait en réalité la protection et la promotion de la santé, puisque ce que l’on fait en réalité vise à permettre aux Canadiens de subir des tests génétiques sans avoir à craindre que des tiers puissent ensuite utiliser contre eux l’information émanant de ces tests. Ce serait là la nature réelle du cœur de cette loi, plutôt que (comme son titre semble l’indiquer) le fait d’interdire la discrimination génétique. Nuance importante…
À son examen, la Cour d’appel conclut que les articles 1 à 7 de la LNDG n’interdisent pas vraiment la discrimination génétique; ils interdisent plutôt d’accéder aux renseignements découlant de tests génétiques. Nulle part dans la LNDG n’interdit-on l’utilisation de tels renseignements, y compris ceux qu’on obtiendrait volontairement d’un individu ou par d’autres moyens. Comme la LNDG n’interdit pas réellement la discrimination génétique, on doit chercher sa nature réelle ailleurs, peu importe le titre qui a été donné à cette loi.
Comme le législateur fédéral arguait que la LNDG s’avérait nécessaire pour enrayer un problème du genre de ceux qu’on tente d’enrayer grâce au droit criminel, la question se pose: dans quelle mesure on peut véritablement sauvegarder cette loi en la plaçant sous l’ombrelle du droit criminel? Or, à la lecture de la LNDG, la Cour d’appel peine à voir le «mal» qu’essaierait ici d’enrayer la loi en question. Au contraire, ce qui ressort de la lecture de cette loi est plutôt une tentative de favoriser la santé des Canadiens, ce qui s’avère un peu loin du genre de préoccupations qu’on peut raisonnablement placer sous le chef de compétence du droit criminel, que l’article 91 (27) réserve au fédéral.
Pour la Cour d’appel, le but recherché ici s’avère trop près de la santé, une compétence résolument provinciale en vertu de la Constitution. Les articles clés 1 à 7 de la LNDG sont donc inconstitutionnels, parce que dépassant la compétence du législateur fédéral.
Bien que ce genre de loi puisse s’avérer souhaitable pour la société canadienne, en 2019, ce sont les provinces qui devraient y voir individuellement.