On rapportait cette semaine que le Conseil européen adoptait le 15 avril dernier, par un vote à peine majoritaire, une nouvelle directive européenne en matière de droit d’auteur. Cette directive a été largement débattue et s’avère loin de faire l’unanimité parmi ceux qui s’intéressent au droit d’auteur.
La réforme s’avérait nécessaire dans le contexte de notre époque, notamment afin de voir à réconcilier les droits des créateurs et ceux des exploitants de plateformes telles YouTube et Pinterest, lesquelles veulent laisser leurs membres utiliser les œuvres d’autrui ou, à tout le moins, pouvoir fonctionner sans s’exposer à trop de poursuites en contrefaçon de la part d’auteurs. Pour ce faire, le nouvel article 17 vient notamment imposer aux exploitants de plateformes en ligne le devoir de se montrer proactifs afin d’éviter la diffusion trop libérale d’œuvres de tiers par leur entremise. Ce faisant, l’Europe propose de renverser l’état actuel des choses, alors que la vaste majorité des États placent le fardeau de repérer puis de pointer les cas de contrefaçon sur les épaules des auteurs et détenteurs de droits d’auteur. C’est, pour ainsi dire, un renversement majeur.
Cet article 17 de la directive vient d’ailleurs imposer aux exploitants de plateformes de médias sociaux et de jeux informatiques en ligne l’obligation d’obtenir la permission des auteurs avant de permettre la reproduction de leurs œuvres sur ces plateformes. Ceux qui ne le font pas s’exposeront à des poursuites en contrefaçon à moins de pouvoir démontrer avoir déployé leurs meilleurs efforts afin d’obtenir une permission ou afin de rendre le contenu en question non disponible, y compris dès que le détenteur des droits a porté une violation de ses droits à leur attention.
La directive comprend aussi (à l’article 15) un droit d’être rémunéré pour les éditeurs dont le contenu est repiqué par des sociétés de services en ligne (comme des moteurs de recherche et des agrégateurs de nouvelles), en fonction d’une part des revenus générés grâce à une telle reproduction. À noter cependant que ce droit ne s’appliquera pas aux individus qui repiquent des articles à des fins non commerciales ni (et c’est l’exception la plus importante) quand le texte reproduit est d’ampleur très limitée. Plusieurs critiquent d’ailleurs déjà l’absence de définition de ce qu’on doit considérer comme un court extrait, terme que les tribunaux de chaque pays européen seront appelés à définir en temps et lieu. Une fois la nouvelle directive officiellement adoptée et publiée (ce qui se produira dans le prochain mois), les pays européens auront chacun deux ans pour en mettre le contenu en œuvre dans leurs lois respectives en matière de droit d’auteur.