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Décision Live! de la C.F.: l’usage d’une marque en association avec des services implique des avantages ou des services accessoires ici même

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La Cour fédérale rendait récemment une nouvelle décision d’intérêt en matière d’usage de marque de commerce, dans Live! Holdings, LLC. c. Oyen Wiggs Green & Mutala LLP and Pickering Developments (Bayly) Inc. (2019 FC 1042) précisant davantage la mesure dans laquelle une société étrangère peut prétendre continuer à bénéficier de droits quant à une marque relativement à des services rendus à distance à des Canadiens.

Ce qui s’avère particulièrement intéressant avec cette décision récente, c’est qu’elle semble contredire d’autres décisions récentes en la matière, en concluant cette fois qu’en l’absence de présence réelle au Canada, il ne s’avère pas suffisant de permettre à des Canadiens de réserver des billets ou des séjours d’hôtels à l’étranger. Selon la C.F. (cette fois), le droit des marques exige plus pour conclure qu’une entreprise étrangère utilise réellement une incarnation canadienne de sa marque de commerce.

Comme on s’en souviendra, la C.F. rendait une décision allant dans la direction contraire l’an dernier (Hilton Worldwide Holding LLP c. Miller Thomson, 2018 FC 895), laquelle concluait que la chaîne hôtelière HILTON pouvait être vue comme utilisant sa marque, au Canada, même en l’absence d’hôtels ici, puisqu’acceptant des réservations de chambres aux États-Unis par des internautes canadiens. Le fait que des Canadiens bénéficiaient, ici même au Canada, d’avantages accessoires à l’hospitalité d’Hilton (à l’étranger) justifiait de lui permettre de prétendre utiliser sa marque au Canada en association avec des services d’hôtellerie.

Cette fois, cependant, la C.F. adopte la position qu’on ne peut pas nécessairement être considéré « utiliser » une marque au Canada si, par exemple, le titulaire n’offre pas de services accessoires au Canada. Contrairement à la décision Hilton, par exemple, le titulaire de la marque dans Live! n’offrait pas de rabais ni de programme de fidélité par l’entremise de ses services de réservations à distance qui puisse éventuellement être dépensés au Canada. Pour la C.F., une telle trame de faits ne permet pas de conclure que des Canadiens recevaient des avantages qui sont suffisants pour prétendre qu’une part réelle de la prestation des services visés s’effectuait au Canada. Selon le tribunal, simplement savoir qu’un client canadien sera admis à tel événement ou qu’il bénéficiera d’une chambre aux États-Unis ne rencontre tout simplement pas le seuil requis en matière d’usage de marque en sol canadien, puisque l’activité en question se produit outre-frontière.

On parle évidemment ici de services tels des services de vente au détail ou d’hôtellerie, par opposition à des services de réservation de chambres d’hôtel, par exemple.

Bien qu’il soit indubitablement possible pour une entreprise étrangère d’utiliser sa marque de commerce au Canada par un contact avec les clients par Internet, en l’absence d’une présence physique au pays, on doit trouver plus.  Dans ce genre de situations, le droit canadien exige que des Canadiens bénéficient de réels et tangibles avantages, au Canada, qui devront généralement aller au-delà d’avoir simplement accès à un site Web, par exemple. Si on veut pouvoir prétendre utiliser une marque ainsi, encore faut-il que des Canadiens en tirent des avantages alors qu’ils sont en sol canadien.

Ce genre de trame de faits peut s’appliquer, par exemple, lorsqu’un détaillant ou un exploitant d’hôtel transige par Internet ou par téléphone avec des Canadiens. À défaut de fournir une part de ce qui constitue les services visés alors que le client est en sol canadien, en droit, ce n’est tout simplement pas de l’usage de la marque de commerce. Aussi, bien que notre droit accepte la possibilité qu’une société étrangère puisse atteindre le seuil de ce qui constitue de l’usage d’une marque en faisant affaire par Internet, encore faut-il pour ce faire qu’en pratique des Canadiens reçoivent effectivement des avantages et/ou des services accessoires en sol canadien. À défaut, il pourra s’avérer difficile de prétendre que (juridiquement) l’entreprise utilise réellement sa marque au Canada.