On déposait récemment un projet de loi visant à modifier la Loi sur le droit d’auteur (la «LDA»), afin d’en retirer le concept de droits d’auteur de la «Couronne» (c.-à-d. le gouvernement).
Le projet de loi C-209 propose en effet de modifier l’article 12 de la LDA, lequel dit jusqu’à maintenant, relativement aux œuvres créées par le gouvernement (ou, dans le jargon législatif, «Sa Majesté» – oui, vraiment):
12 Sous réserve de tous les droits ou privilèges de la Couronne, le droit d’auteur sur les œuvres préparées ou publiées par (…) Sa Majesté ou d’un ministère du gouvernement, appartient, sauf stipulation conclue avec l’auteur, à Sa Majesté…
Le projet C-209 amenderait cet article pour plutôt dorénavant prévoir que:
12 Sous réserve de tous les droits ou privilèges de la Couronne, il n’existe pas de droit d’auteur sur les œuvres préparées ou publiées par (…) Sa Majesté ou un ministère du gouvernement.
En somme, le Canada se débarrasserait donc de la possibilité pour le gouvernement de prétendre posséder des droits d’auteur quant à ce qu’il crée, comme c’est le cas aux États-Unis. Une fois ce projet de loi adopté, tout ce qui émane d’un gouvernement (incluant ses organismes subalternes comme les municipalités) ferait donc de facto dorénavant partie du domaine public.
À noter que l’article 12 (actuel et envisagé) s’applique d’ailleurs non seulement à ce que nos fonctionnaires créent, mais aussi à tout ce que des tiers (notamment des fournisseurs du gouvernement) peuvent concevoir «par l’entremise, sous la direction ou la surveillance» du gouvernement — une expression encore relativement mal balisée par la jurisprudence. Généralement, jusqu’à maintenant, si le gouvernement confie à une entreprise la tâche de créer quelque chose pour lui, ce sera le gouvernement qui disposera des droits d’auteur quant aux œuvres visées.
Au Québec, il est intéressant de noter que le gouvernement pourrait se voir (en quelque sorte) couper l’herbe sous le pied, lui qui prétend généralement avoir droit d’empêcher toute reproduction et utilisation des documents gouvernementaux de toute nature. La norme adoptée au Québec (en vertu de la Loi sur les services gouvernementaux aux ministères et organismes publics) pourrait donc devenir largement caduque.
À l’avenir (avec l’adoption éventuelle de ce projet de loi), tout ce que produit comme œuvre le gouvernement pourrait bien s’avérer susceptible de reproduction et de réutilisation, ce qui, il faut bien l’avouer, est plutôt logique.
Le projet de loi fédéral C-2019 a été déposé (en première lecture) le 19 février dernier. Reste à voir ce qu’il en adviendra, si jamais le processus législatif finit par reprendre.