La Cour fédérale nous donnait récemment un jugement en droit d’auteur et discutant notamment du problème des certificats d’enregistrement obtenus juste avant ou au moment d’instiguer un tel litige. La décision en question est celle de Patterned Concrete Mississauga Inc. c. Bomanite Toronto Ltd. (2021 CF 314).
La société Patterned Concrete Mississauga Inc. («PCM») fabrique et vend des patios, des dalles et des éléments d’allées en béton dans le secteur résidentiel. Pour l’aider dans le cours normal de ses ventes, PCM a conçu et utilise des modèles de documents uniformisés, dont un formulaire spécifique de devis, un formulaire contractuel et un certificat de garantie limitée (collectivement, les «Oeuvres»). Lorsqu’elle apprend qu’un concurrent nommé Bomanite Toronto Ltd. («Bomanite») utilise ce qui semble être une copie de ses oeuvres, PCM intente un recours pour jugement sommaire, devant la Cour fédérale, fondé sur l’existence d’un droit d’auteur sur les oeuvres, afin d’obtenir une compensation et une injonction contre Bomanite.
Bonne nouvelle pour PCM, le tribunal lui accorde des dommages (préétablis) et l’injonction demandée, puisque la copie s’avère suffisamment claire, etc. Par contre, au début de son analyse, au moment de déterminer si on a fait la preuve adéquate de l’existence de droits d’auteur quant aux trois œuvres en question et si c’est bien PCM qui en était détentrice, les choses ont bien faillis se gâter pour la requérante.
Ce qu’il faut comprendre à ce sujet, c’est que PCM avait fait sa réclamation à peu près au même moment qu’elle avait obtenu ses certificats d’enregistrement de droit d’auteur quant aux œuvres visées. En telles circonstances, Bomanite avait ensuite argué qu’on ne devrait pas tenir compte des certificats en question, puisque visiblement obtenu «en prévision d’un litige». Selon une interprétation donnée par certains à la jurisprudence, de tels certificats qu’on est allé chercher clairement dans le but de pouvoir mieux poursuivre tel ou tel défendeur devraient être ignorés, parce n’ayant pas été obtenu «dans le cours normal des activités» du détenteur. Ici, devait-on pour autant faire fit des certificats d’enregistrement de PCM?
Afin de répondre par la négative à cette question, le tribunal fait remarquer qu’il est faux de dire que nos tribunaux ont réellement énoncé une règle à l’effet qu’on doit nécessairement écarter de tels certificats. Selon la C.F. dans cette affaire, la règle est plutôt à l’effet qu’en pareilles circonstances, si le défendeur présente, lui, des preuves tendant à contredire l’existence de ces droits d’auteur ou qu’ils appartiennent bien à ce requérant, alors le tribunal peut chercher à sous-peser tous ces éléments de preuve, incluant les certificats.
Or, dans le litige en question, puisque Bomanite n’a pas présenté de réelle preuve permettant de douter de l’existence ou de la propriété des droits d’auteur en question, PCM peut tout à fait bénéficier des présomptions prévues à la Loi sur le droit d’auteur dans les cas où le requérant s’est donné la peine d’obtenir et de produire des certificats d’enregistrement de ses droits d’auteur. Cela permet à la C.F. de conclure non-seulement à l’existence des droits de PCM quant aux œuvres mais aussi à la contrefaçon par Bomanite.
Au final une bonne leçon à tirer d’une décision comme celle-ci, c’est de prendre l’habitude d’enregistrer nos droits d’auteur quant aux œuvres qu’on créées, au fur et à mesure, de façon à éviter toute discussion (juridique) si jamais on finit devant les tribunaux au sujet de l’une d’elle!